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CEA : la fabrication additive sous contrôle

Contrôle par ultrasons d’une hélice de bateau fabriquée selon le procédé de fabrication additive WAAM
Contrôle par ultrasons d’une hélice de bateau fabriquée selon le procédé de fabrication additive WAAM © Cyrille Dupont
Le CEA (Commissariat à l’Energie Atomique et aux Energies Alternatives), organisme de recherche public, intervient dans quatre domaines majeurs : la défense et la sécurité, les énergies bas carbone (nucléaire et non renouvelable), la recherche fondamentale (sciences de la matière et de la vie), et la recherche technologique pour l’industrie. C’est dans ce dernier domaine que s’inscrivent les activités de l’institut CEA-LIST, dédié aux systèmes numériques intelligents.

Céline Deloffre - Responsable de la coordination des activités de Fabrication Additive au CEA-List

Céline Deloffre responsable de la coordination des activités de Fabrication Additive au CEA-LIST
Céline Deloffre
Quels sont les enjeux auxquels répondent la fabrication d’objets métalliques par fabrication additive pour la maintenance industrielle ?

Céline Deloffre : La fabrication additive – on utilise aussi le terme Impression 3D – regroupe un ensemble de technologies permettant la fabrication de pièces par ajouts successifs de matière.
Ces moyens de fabrication ouvrent de nouvelles perspectives car ils permettent de réaliser des composants complexes dans des délais courts.
La fabrication additive permet ainsi des gains de temps, de performance et une réduction des coûts tout au long du cycle de vie des produits :

  • accélération des cycles de développement et de mise sur le marché,
  • optimisation des géométries des pièces,
  • consolidation des conceptions assemblées et intégration de fonctions,
  • réduction des stocks et des rotations lentes,
  • réparations et gestion des obsolescences.

 

Par ces points, on voit que la fabrication additive présente un intérêt fort en ce qui concerne les opérations de maintenance des équipements.
En effet, elle permet d’obtenir dans un délai réduit des pièces de remplacement qui n’existent plus.
Certains procédés de fabrication additive permettent également de réparer temporairement des pièces pour limiter les temps d’immobilisation, voire de rénover des pièces ou de leur ajouter des fonctions en rajoutant de la matière.
En effet, elle permet d’obtenir dans un délai réduit des pièces de remplacement qui n’existent plus.

 

Quels secteurs industriels font appel à cette fabrication d’objets métalliques pour la maintenance industrielle ?

C.D. : Pour l’instant, l’utilisation de la fabrication additive pour la réalisation de composants métalliques pour la maintenance reste encore limitée. Cela est en grande partie lié à des questions de qualification et de certification des pièces réalisées par le biais de ces nouveaux procédés.
Cela étant dit, l’utilisation de la fabrication additive métallique pour la maintenance intéresse de nombreux industriels dans des secteurs tels que l’énergie, le transport ou l’outillage par exemple.

 

Pouvez-vous nous citer quelques exemples concrets de pièces illustrant ces enjeux dans des secteurs industriels que vous avez cités précédemment ?

C.D. : Oui. Il y a l’exemple de la commande manuelle de vanne obsolète sur laquelle le CEA a travaillé pour EDF. En 2019, la SNCF présentait au salon 3D Print l’installation sur rame d’un support d’amortisseur anti-gîte réalisé en fabrication additive. L’entreprise estimait qu’à terme 30% de l’offre de maintenance proposée par la Direction du Matériel de SNCF pourrait être réalisée en fabrication additive. Le groupe Engie a investi dans un centre de fabrication additive, certifié en 2019, avec pour objectif de fournir des solutions de maintenance, de réparation et de révision à ses centrales nucléaires.
Pratt & Whitney a annoncé, en 2020, la fabrication additive d’un composant de maintenance et réparation de moteur d’avion.
Plus récemment, Siemens Energy a annoncé travailler sur une nouvelle chaîne de réparation pour améliorer les fonctionnalités des aubes de turbine à gaz en s’appuyant sur un procédé de fabrication additive hybride. Des premières aubes auraient été réparées par ce moyen.

Steve Mahaut - Chef du laboratoire de méthodes de contrôle et expert sénior au CEA-List

Steve Mahaut Chef du laboratoire de méthodes de contrôle et expert sénior au CEA-List
©CEA Steve Mahaut
Quels sont les enjeux du contrôle dans le process de fabrication additive de pièces pour la maintenance ?

Steve Mahaut : Les enjeux du contrôle des pièces en fabrication additive, qu’il s’agisse de séries ou d’éléments de maintenance, sont essentiellement liés aux règlementations associées à leurs usages (énergie, aéronautique). L’un des premiers points consiste précisément à établir les différents types de défauts (porosités, fissurations, défauts d’aspects ou de forme- contraintes résiduelles…) pouvant apparaître en fonctions des différents procédés, et leur la criticité et impact sur la pièce en usage selon les cadres règlementaires des différents secteurs, et ce afin de définir les critères de détectabilité que les moyens de contrôle se devront de respecter.

 

Comment vérifier que les pièces fabriquées par ces procédés ne présentent pas de défauts ?

S.M. : Deux axes d’étude complémentaires font l’objet de recherches ambitieuses au CEA-List et plus globalement parmi les principaux acteurs du contrôle non destructif: d’une part le monitoring en-ligne (contrôle de la fabrication in-situ, requérant des instrumentations agiles et flexibles aptes à surveiller le process ainsi que des outils d’analyse et de simulation), et d’autre part le contrôle post-fabrication des pièces, qui exige des méthodes avancées pour inspecter des pièces de géométrie complexe par nature (ce qui constitue la plus-value de la fabrication additive par rapport aux procédés conventionnels).

Arcelor Mittal Espagne, dans le cadre d’Integradde, s’intéresse à la fabrication et la fonctionnalisation et réparation de pièces de machine outils en sidérurgie par dépôt de matière.

Steve Mahaut

chef du laboratoire de méthodes de contrôle et expert sénior — CEA-List
À quel stade cette recherche sur la fabrication additive et son contrôle est-elle effectuée ?

S.M. : La recherche en fabrication additive est toujours extrêmement active, avec l’émergence de nouveaux procédés (WAAM, WLAM, Binder Jet). En termes de contrôle, les axes mentionnés précédemment ont été lancés au CEA-List il y a 6 ans dans le cadre du projet FUI I-AM-SURE, coordonné par la société BeAM (aujourd’hui AddUp). Ce travail se poursuit aujourd’hui dans le cadre de projets européens tels que Integradde, Grade2XL et NUCOBAM, ainsi qu’au sein du consortium AFH (Additive Factory Hub) à Saclay. Ces projets associent des organismes de recherche, laboratoires académiques et industriels dans tous les secteurs (plus d’une quinzaine d’industriels contribuent à ces projets), pour des usages en production, machines-outils ou maintenance.
À titre d’exemple en maintenance, on peut citer Arcelor Mittal Espagne, qui dans le cadre d’Integradde, s’intéresse à la fabrication et la fonctionnalisation et réparation de pièces de machine outils en sidérurgie par dépôt de matière.

 

Quels services proposez-vous aux professionnels de la maintenance industrielle ?

S.M. : La fabrication additive est l’un des outils que des industriels peuvent déployer dans leur stratégie de maintenance, permettant de réduire des ruptures de chaines de production (réparation de pièces temporaire, en attente de pièces de rechange par exemple), ou de gérer l’obsolescence (défaillances ou absences de fournisseurs sur des infrastructures ou machines-outils anciennes). Selon les secteurs et usages, des contraintes règlementaires d’inspections peuvent s’appliquer et le CEA-LIST peut répondre à ces besoins ou accompagner les industriels.

 

Propos recueillis par Valérie Brenugat – source : www.maintenance-entreprise.com

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